Elementor #917

Article J.C. Fournier



ARTICLE PARU SUR LE MAGAZINE LITTÉRAIRE ET CULTUREL EN LIGNE « VU DU BOURBONNAIS »
NUMÉRO 31 (MAI-JUIN 2021)
RUBRIQUE « ACTUALITÉS DES AUTEURS, DES ÉDITEURS, DES LIBRAIRES ET DES MÉDIAS »
 
• JEAN-CLAUDE FOURNIER
QUAND UN ROMANCIER SE PENCHE SUR L’HISTOIRE• Né à Montluçon en 1942,  Jean-Claude Fournier a d’abord connu une “première vie” qui  l’a conduit à enseigner la langue de Shakespeare en France mais aussi en Algérie, entre 1983 et 1986, en passant par les États-Unis et la Nouvelle Calédonie. À l’heure de la retraite, il  s’est mué en écrivain.  Il a déjà à son actif plusieurs romans, fleurant la nostalgie des Sixties, celle de sa jeunesse montluçonnaise. C’est le cas du Prince des parquets salons, de Hollywood sur Cher ou de Swinging mai 68., titres qui lui on valu plusieurs prix littéraires.   Autre nostalgie, celle du parler montluçonnais avec  Si Montluçon  nous était conté, en Molussonnais dans le texte. Ajoutons qu’il s’est aussi aventuré en poésie, avec entre autre les Poèmes à Sarah. En quelques mois,  sa bibliographie vient de s’enrichir de trois nouveaux titres, entre roman, essai littéraire et histoire. 
DES ORANGES AU GOÛT AMER
Le décor planté dans 1984, les oranges amères de la petite  Kabylie,  c’est celui qu’il a lui-même connu, lorsqu’il était professeur  coopérant dans l‘Algérie du début des années 1980, un pays où il a su nouer mais aussi  conserver de nombreuses et solides  amitiés. Pour en bâtir la trame, il a donc  pu puiser dans ses propres souvenirs.  Son roman  conte l’histoire de Serge et de Christian, deux enseignants français, qui s’embarquent ensemble à destination de l’Algérie où ils ont choisi de devenir coopérants. La ville de Bejaïa leur ouvre les bras. Tous les deux sont curieux de découvrir, à travers ses acteurs locaux,  une culture ont-ils ne savent pas grand-chose,  dans  un pays aux mille visages. Une tâche pas forcément aisée, surtout lorsqu’on se retrouve dans  une contrée qui a vécu la colonisation. À travers le regard des deux coopérants, c’est tout un  pan de l’histoire de l’Algérie qui émerge, avec les épreuves politiques et sociales qui ont traversé le pays entre l’indépendance et la “décennie noire”.  Ce roman a également fait  l’objet d’une publication en Algérie  par les éditions Tafat (“la lumière” en kabyle) sous une couverture différente, avec pour titre « Le fou de Leila » (voir couverture en pièce attachée). Dans ce pays, depuis sa sortie, le livre connaît un franc succès, que ce soit en librairie ou à l’occasion de salons du livre, comme celui qui s’est tenu récemment  à  Alger (vor pièces attachées).
 
LA PERCEPTION DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE
PAR CHARLES DICKENS :
UNE VISION PRÉMONITOIRE
Le même auteur est aussi capable de se risquer sur de nouveaux territoires, comme en attestent ses deux dernières publications.  Avec La révolution française selon Dickens (420 p, éditions le Lys bleu, sans chercher à prendre parti pour telle ou telle “théorie” de la Révolution française, il  propose d’explorer « Un conte de deux villes, » un texte aux allures prémonitoires, écrit par Charles Dickens. Il suggère que l’auteur d’Oliver Twist serait finalement  le premier, bien avant Arendt et Orwell en tout cas, à avoir entrevu,  dans les tueries de 1792 et de 1793, les atrocités à venir du stalinisme et de l’hitlérisme. À sa manière, Dickens devine l’émergence d’un système tyrannique d’un type nouveau dans l’histoire de l’humanité. Ce faisant, il nous alerte sur le “saut qualitatif ” effectué entre 1792 et  1793 dans l’aliénation des êtres humains. Selon lui, les citoyens se sont alors retrouvés confrontés à deux fléaux, ce qu’il appelle la “surveillance générale”, d’une part, et d’autre part une extermination de masse rendue plus efficace par le recours à une invention technologique qu’il estime diabolique, la sinistre guillotine. C’est finalement  un appel à réflexion  sur cette époque de notre histoire, modèle pour les uns, repoussoir pour les autres,  que proposent ces commentaires et analyses de  l’un des deux romans historiques de Charles Dickens.
 
JEAN-BAPTISTE FOURTIN
UN PARCOURS À LA CHARNIÈRE DE DEUX ÉPOQUES
Avec Moi Jean-Baptiste Fourtin (1845-1921) Mémoires (éditions  le Lys Bleu, l’auteur montluçonnais délaisse à nouveau  le roman et opère un retour en Bourbonnais, en prêtant sa plume au  récit d’une vie, celle  de Jean-Baptiste Fourtin. Fils de tisserand, natif de Saint-Pourçain-sur-Sioule, qu’il a déchiffré, corrigé, annoté et accompagné de nombreuses illustrations d’époque. L’auteur de ces mémoires avait légué à sa famille un manuscrit inédit dans lequel il retraçait ses parcours (personnel, professionnel et politique), à la charnière des XIXè et XXè siècles, entre un Second Empire qui vivait  alors  ses derniers feux et une Europe qui allait bientôt s’embraser en 1914.  Compagnon du tour de France, il se retrouve mobilisé pour  servir en Algérie de 1870 à 1871.  De retour au pays, il s’installe comme peintre et limonadier et il devient élu municipal sur une liste radicale socialiste dans sa ville natale. À ce poste,  il va  contribuer à la promotion et à la défense des écoles laïques de sa commune, avant de prendre sa retraite peu avant le début de la guerre de 14-18. Au fil des pages et des souvenirs, défilent   donc 70 ans d’histoire  de France, entre Saint-Pourçain et les villes et régions où le narrateur à séjourné pendant son tour de France des compagnons. Le tout est raconté avec ses mots à lui,  tel que cela  a été  vécu par ce témoin privilégié. On découvre comment les “petites gens” ont traversé les soubresauts de la “grande histoire”, riche en événements tragiques autant qu’en bouleversements sociaux et politiques.
L’un des intérêts principaux de ce texte est de montrer  comment ce fils du peuple a vécu de manière digne toutes  les mutations économiques, sociales politiques et culturelles profondes dans une époque mouvementée. Sans fioritures, ni grandiloquence, Jean-Baptiste Fourtin aborde aussi  sa vie quotidienne,  professionnelle,  sentimentale et familiale. Ses mémoires recèlent  aussi une succession de drames familiaux tout en montrant  sa fidélité aux  engagements qu’il estime dus à ses proches et à ses amis. Pour la plupart, il les a  rencontrés partout où il a travaillé comme plâtrier-peintre, bien au-delà de sa commune d’origine,  à  Bourges, en Anjou, en Touraine, à  Nantes, à Bordeaux, en Bretagne, dans le Lyonnais, à Paris, bref dans toute cette France, de l’entre deux époques. Entre ses deux années passées en Algérie comme soldat sous le second empire, et les privations endurées  pendant la Grande guerre, avec  leurs conséquences sur la population civile. Pour que le lecteur puisse s’y retrouver dans la chronologie des grands événements qui ponctuent la vie de Fourtin, Jean-Claude Fournier a émaillé le texte de nombreuses notes. Elles concernent aussi bien les  faits historiques, culturels, politiques ou sociaux que les modes de vie,  les personnages publics ou encore les lieux qui forment la toile de fond de l’histoire. Des gravures, des lithographies ou des photos permettent aussi de visualiser les lieux, au fil des pérégrinations et aventures du narrateur.

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